28 décembre 2007

Idiomes

Depuis que j'ai commencé à bosser, je me dis que je devrais tenir un petit cahier des expressions que j'entends lors d'entretiens avec des clients, certains d'entre-eux présentant un lyrisme tout particulier.


La majorité de mes dossiers concernent de près ou de loin des successions : appréhender la matière n'est pas une chose simple car elle mélange assez le sentiment et le droit en tant que tel : l'expliquer aux gens l'est encore moins. Réserve successorale, Inventaire, conversion de l'usufruit, usus-fructus-abusus, valeur vénale, rapport, réductions, apposition de scellées, envoi en possession, délivrance de legs, testament authentique, donation entre époux, acte de notoriété, précompte immobilier, nue-propriété, déclaration de succession, stipulation pour autrui, testament olographe, receveur de l'Enregistrement, avis de droits, contrat de mariage, séparation des biens avec constitution d'une société d'acquêts, donation par préciput et hors part, donation en avancement d'hoirie, res inter alios acta, actori incubit probatio, codicille, régime légal de communauté, compte de reprise et récompense, contribution aux charges du ménage, et j'en passe (Aspégic?) sont autant de mot qui sortent de ma bouche (j'ai honte, si si) et qu'il faut expliquer.

Quoi de mieux qu'un petit dessin dans ce cas ? La plupart du temps c'est ce que je fais. Je vais bientôt avoir une quote sur le marché de l'art avec mes trois cercles, mes flèches dans tous les sens, mais c'est beaucoup plus compréhensible, en tout cas, généralement, les gens commencent à poser des questions prouvant que la pièce est tombée.


Le plus amusant arrive lorsque les gens utilisent à mauvais escient des expressions.

Je n'ai malheureusement pas encore entendu la confusion classique entre "usufruit" et "jus de fruit" que les "Trois frères" ont popularisé il y a plusieurs années, mais je me délecte cependant - à l'insu de mes interlocuteurs - d'expressions populaires, de mots de patois, ou encore d'adages mal utilisées.

Ce qui peut a-priori passer pour une démarche pédante, n'en est pas une : de plus en plus, je me surprend à utiliser ces expressions populaires pour me faire comprendre. Qui plus est, le langage juriste fait souvent face à un hermétisme de la part de la plupart des gens. Il n'est donc point superfétatoire que je vous décrive, faisant appel à votre magnanimité, les quelques expressions idiomatiques dont j'ai gardé le souvenir. (Dafalgan?).



Moi : Quels sont vos revenus ?

Lui : Je touche la Vierge Noire



Il faudrait supprimer le "Vierge" alors ;-) : les personnes considérées comme invalides reçoivent leur revenus ceux d'un organisme situé Rue de la Vierge Noire à Bruxelles...



"Moi: Quelle est votre profession ?

Lui : Je suis invalide à 66%"



Et les 33 autres ?



Elle : "Il ne faudra pas qu'on attrappe un accident, on n'sait jamais."



Ou encore :



- "Si ca serait moi qu'j'aurééé la mèèson, c'est bon alors, j'dois payer de suite ou j'peux attentt ?"



- "Nondedjeu, en'da des papiers à signer. Moi, moins qu'en d'a, mieux que j'm porte."



- "Lui : parce que je voudrais vous poser une question.


Moi : dites-moi,...


Lui: Si j'divorce, elle peut me réclamer la moitié de mon garage ?


Moi : ça dépend, mais si elle n'est pas de bonne composition et que les choses se passent au plus mal, elle discutera sans doute sur le fait qu'elle vous en a payé la moitié.


Lui : mais elle n'a jamais rien payé... elle touchait juste à la mutuelle et les allocations familiales.


Moi : je sais, ce n'est sans doute pas juste, mais c'est fonction de votre régime matrimonial.



Lui : j'crois que j'vais la tuer ce sera plus simple (fallait voir le colosse italien bagué comme jamais, style Vito de la maffia, l'homme de main du parrain)


Moi : ???? ... euh et hein non !!!! Si vous faites çà vous allez au devant de beaucoup d'ennuis


Lui : Bah, deux ans de prison, c'est vite passé, le seul truc c'est les enfants... mais si elle fait la salope, je la bute."




- lui : "Ouais, paske faut pas croire comme ca, mais à Morlanwelz, y'a des sauvach hein !

Sa femme : Min wèè, pleins, mais vréément des gens spéciaux vous savez"



Les sauvages, c'était eux !



Sans oublier :



- "Dis m'fi, wèsk'il est l'comptap ? J'a v'nu payer m'fermach !"



- Parce que vous comprenez, il faut remettre la cerise sur les "i" "



Et puis je m'y mets !!!!



"Parce qu'en d'a des cliquoteux qui vous mettent des fils partout dans les murs"



" Es n'homme là, l'è st'arringi côme un vi gran pé"



"E'n sé ni vô dire m'bio"



Moi : "Vous avez déjà payé le précompte immobilier ?

Lui : c'est quoi s'truc ?

Moi : el'foncier

Lui : n'l'ai ni co r'çu"



Si vous connaissez d'autres expressions wallonnes autres que "chénié mi" ou "minga ti", je suis preneur... La plupart de celles que j'utilise, c'est avec mes collègues, mais je ne resiste pas toujours à glisser un mot wallon aux gens... A vos dicos wallons et vieux de village !